Un trek au sommet
Mon réveil sonne à 4h20. Puis à 4h22. Une deuxième alarme plus que recommandée si on veut se réveiller à cette heure-ci. Je sors très rapidement de mon lit pour une heure pareille. C’est sans aucun doute lié à l’excitation liée au programme de cette journée : le Tongariro Crossing, une randonnée d’un peu plus de vingt kilomètres à serpenter les monts Tongariro et Ngauruhoe. Je me prépare vite, je m’habille chaudement. Un peu plus de quarante kilomètres m’attendent avant d’arriver au point de départ de la navette qui me mènera au début du sentier. Je roule dans la nuit noire. C’est ma première fois, je fais attention.
Après une demi-heure de route, je me gare, et déjà sur le parking, d’autres randonneurs prêts à gravir les sommets patientent dans le froid. Nous sommes un peu plus d’une vingtaine dans le petit bus 4x4 affrété pour acheminer les milliers de randonneurs qui parcourent le sentier chaque année. Le voyage se fait dans un silence analeptique. À moitié dans la nuit, à moitié dans la préparation mentale du trek. De l’autre côté de la vitre, il n’est pas encore 6 heures que déjà le ciel semble au loin s’éclaircir. Le soleil semble déployer toute sa force, luttant contre l’obscurité pour faire naître, au fil de l’horizon, une lueur douce et offrir ses premiers rayons au monde encore endormi.
Il est 6h25. Premier pas, la randonnée commence. Petit à petit, le soleil offre ses magnifiques couleurs dégradées de rose et de bleu. La montagne se réveille. Le mont Ruahepu au loin s’éclaircit. Au fil de la marche, le paysage marqué par une végétation basse composée essentiellement de bruyères laisse place à de la roche volcanique noire, où par endroits, sur les falaises, des plantes au vert doux s’accrochent. La montée, jusque-là simple, devient plus ardue. Il faut monter avec force les quatre cents mètres de dénivelé entre Soda Springs et le Cratère rouge. Mais le paysage est saisissant. Au loin, on voit encore le mont Taranaki, pourtant à plus de cent kilomètres. La fumée sort par endroits. Les lacs bleus turquoise contrastent avec la roche noire. La beauté des paysages, à la fois la vue que la montée au sommet offre, et ce que cette formation de la nature nous donne, est indescriptible. Tout au long du chemin, qui m’aura pris plus de sept heures et demie à accomplir, je me suis perdu dans un souffle d’éternité, un instant suspendu où la beauté m’a effleuré. J’y ai senti battre le cœur du monde sur ce volcan encore vivant qui rappelle que sous cette roche impénétrable, sous nos pieds, la Terre vit.